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Attention : terrain délicat, mouvant, piégé, passionnel, passionnant.

Il était une fois un journal satirique paraissant le mercredi qui écornait tous les pouvoirs, séculiers et réguliers, qui n’était lié à aucun parti, ne dépendait d’aucun budget publicitaire, et n’avait d’autre souci que railler, en un temps d’ordre et de censure. Sous la guerre d’Algérie, Le Canard enchaîné fut un des lieux de résistance, notamment de protestation contre la torture. On l’achetait pour rire, pour lire les délicieuses chroniques de la Cour, pour s’assurer qu’en France les libertés publiques n’étaient pas mortes.
 Au tournant des années 1970, le journal change complètement. D’équipe, de projet, de nature. Il soutient expressément les socialistes qui vont accéder au pouvoir. Et surtout, il se mue en journal d’investigation et d’influence. Les vingt-cinq permanents (les mieux payés de la profession) s’entourent d’une armée de collaborateurs de l’ombre - cela va des amis politiques aux agents secrets, de la garde rapprochée de Mitterrand à Jean Montaldo, des juges aux justiciables. 
Un journal d’influence, cela veut dire un journal qui influence et un journal qui est influencé. On sait aujourd’hui que l’affaire des diamants de Bokassa fut un coup monté par les gaullistes contre Giscard, que les micros clandestinement posés au Canard ne furent pas, comme l’écrivit le journal, découverts par hasard, que la feuille d’impôts qui coûta sa carrière à Jacques Chaban-Delmas n’est pas sortie de nulle part. On sait que le dossier Papon fut fouillé de près, à bon droit, mais que le dossier Bousquet - ami de Mitterrand - fut opportunément refermé. On flaire que Boulin à droite, Bérégovoy à gauche, tous deux suicidés, furent indirectement flingués par des amis qui leur voulaient du bien. 
C’est cette saga que racontera le livre. Avec minutie et sans hargne aucune. Le Canard, les auteurs l’aiment bien. Mais, puisqu’il fait la morale à tout le monde, il est temps qu’à son tour il devienne objet d’une investigation rigoureuse.