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Émile Zola
Paris
Paris, publié en mars 1898, un mois après "J'accuseà!", ramenait Zola vers sa ville, la ville où brûlaient toutes les fièvres du monde contemporain. Le héros, qui est toujours Pierre Froment, quittera la prêtrise à la fin de l'oeuvre, sauvé du désespoir de ne plus croire par ses retrouvailles avec une jeune femme. Marie, qu'il épousera. Dans l'intervalle, il a été le témoin de toutes les crises et de toutes les misères sociales qui mettent en péril l'idée de justice, et l'État républicain.
Le scandale politique et financier, avec l'affaire de Panama, les parlementaires corrompus, la presse complice ou haineuse - autant d'aubaines pour l'extrême droite antisémite. C'est aussi l'agitation anarchiste, avec l'explosion de bombes dans la capitale, la répression impitoyable, les guillotinades, les "lois scélérates", l'intimidation des milieux socialistes et libertaires. Le désespoir des quartiers misérables, qui fait comprendre à Pierre Froment "l'inutilité dérisoire de la charité". L'égoïsme insensible et futile des gens du monde, qui assistent à une exécution capitale comme à un spectacle
Paris est construit sur de fortes scènes: une séance au Palais-Bourbon, un procès en cour d'assises, un grand mariage, l'horreur d'une mise à mort légale. Zola retrouve ici le mouvement et les grands motifs des Rougon-Macquart, associant roman familial et sentimental, roman judiciaire et roman politique - à ceci près que l'issue de ces romans est plus aisément prévisible que par le passé. Mais on entend dans la dernière oeuvre du cycle des Trois Villes des grondements dénonciateurs qui ne se faisaient pas entendre au même degré dans les romans antérieurs, et qui démythifient la "Belle Époque".
Au surplus, la création, sous les traits de Pierre Froment, d'un personnage-témoin, dont il s'en faut de peu qu'il ne devienne le narrateur, atteste la recherche d'une nouvelle fonction et d'une nouvelle allure du genre, quelque part entre Balzac et Proust.